Je me suis récemment rendu dans l’exploitation du Vignoble Des Hautes Collines de Georges Rasse, dont la devise provençale est Longo-Maï, qui signifie « longtemps encore ». Cela fait référence à une forte histoire familiale expliquée tout au long des 2h30 de ma visite dans ce magnifique écrin maralpin : issu d’une grande fratrie de 13 frères et sœurs, lorsque l’on pose à ce passionné la question « depuis combien de générations êtes-vous là ? » il répond sans détour : « On est là depuis qu’on sait. Nos ancêtres les ligures. »

En effet, dans les années 70 les oliviers de sa magnifique exploitation ont été estimés à 2000 ans d’âge. Un ancien oppidum se serait trouvé à cet endroit là. Heureusement, la famille Rasse a le sens de l’héritage familial et des traditions qui perdurent.

Pour les deux frères qui sont les tout derniers viticulteurs de la commune, la relève sera assurée, chaque fils prenant la succession après des vies faites de voyages et comme on le sait les voyages forment la jeunesse.

Mais heureusement les aînés avaient aussi été prévoyants face aux ravages de la betonisation en se battant pour que leurs terrains deviennent des ZAP (Zones Agricoles Protégées) pour une durée de 40 ans, ce qui permet au moins pour une génération encore, peut-etre deux, d’être protégée(s).

Paysage

Une exploitation qui produit près de 10.000 bouteilles par an et des vignes pour les plus jeunes de 7 ans d’âge, pour les intermédiaires de 15 ans et pour les plus anciennes de 60 ans valaient bien cet effort et cette détermination.

Mais pas que : la plus ancienne bouteille du domaine date de 1956 et selon un expert œnologue celle-ci vaudrait en goût un Château Yquem (ou Château dYquem), celui présenté comme le plus grand vin blanc français, ce n’est pas rien.

Mais comment parvient-on à un tel résultat ? Avec de l’amour du métier, un savoir-faire, de la patience mais aussi l’aide des éléments et du climat. A la question de « comment y parvient on ? » la réponse est aussi directe que la précédente évoquée : « Ce n’est que du vin et du soleil ».

Les ultraviolets débarrassent des impuretés, le Soleil et la patience font leur œuvre. Et le fameux « vin tuilé » ? Tout est parti… du Soleil une fois encore. Un vin oublié sur un toit et qui a donné un résultat saisissant. Un rosé vraiment rose (et non orangé comme tous ceux que nous connaissons) prend par exemple une couleur ambrée.

Bouteilles de vins

Développé, ce procédé se résume par : « Un élevage en bonbonne de verre au soleil durant 8 à 9 mois pour le stabiliser naturellement et lui donner des arômes de madère, d’épices exceptionnels. C’est un vin naturel de longue conservation qui s’accorde avec plats épicés en toutes saisons, grillades, fromages et même spécialités niçoises. »

Mais il n’y a pas que ça bien évidemment : des tonneaux en chêne issus des plus grands domaines parce que la fameuse « part des anges » ne peut être remplacée par la chimie.

La quête du naturel passe aussi par des bouchons en liège, qui font leur grand retour après avoir été menacés de disparition car les productions se trouvaient essentiellement en Sardaigne et au Portugal.

Et bien-sûr, le naturel ça passe aussi par des méthodes de désherbage naturel : l’ecopaturage avec un berger de Tourrettes-sur-Loup qui amène ses moutons de l’Hiver jusqu’au Printemps.

Dans la cave mais surtout dans les vignes de ce magnifique domaine on trouve aussi bien du Merlot que du Cabernet Sauvignon, du Rolle, de l’Ugni Blanc, du Sémillon ou encore du Gewurztraminer.

Que ce soit la Cuvée Pressoir Romain, la Cuvée Longo-Maï, Blanc Prestige, Muscat Doré, Rancio, Saint-Jeannet Tardif ou encore la Cuvée Tuileé de Saint-Jeannet, chaque vin dispose par année d’une étiquette spécifique réalisée par l’un de ses frères, Rémy RASSE, artiste-peintre qui expose également ses œuvres au sein du domaine à l’année.

Le domaine s’est par ailleurs diversifié dans la découverte des visiteurs de ce savoir-faire et des voyages œnologiques. On y vient depuis l’Asie, les Etats-Unis et le reste du monde. La Table des Baous y organise aussi des repas-dégustations.

Enfin, le domaine propose également une formule « camping à la ferme » avec 6 emplacements de tente à l’ombre des oliviers ainsi qu’une roulotte gitane. J’ai pu goûter en avant première deux vins de 2021, le premier sera mis en bouteille en Décembre de cette année, l’autre, plus moelleux, en Juin 2022.

Tout ce savoir-faire se consomme avec modération mais surtout délectation. Je remercie Georges RASSE et son épouse de m’avoir fait découvrir leur univers.

Alexandre Gaiffe